Le magasin était en fait une espèce de succursale voudou du Botswana... Un rasta, habillé avec des couleurs criardes et portant toute sorte de pendentifs aux inscriptions kabbalistiques, surgit de l'ombre de l'arrière boutique. Il me parla longuement au sujet de plusieurs objets qu'il vendait, puis je me suis interessé à un en particulier, que j'ai finalement acheté pour un prix modique et que je me suis empressé à déballer chez moi, sur une table.

L'objet en question est une boule de cristal. Je ne suis pas médium, mais on m'a assuré que cette boule possède un pouvoir bizarre qui me permettrait de voir le futur et de le vivre comme si j'y étais... je l'ai achetée car même si ça ne marcherait pas comme prévu, ça aurait fait une décoration assez originale...

Après avoir déballé la boule, je l'ai posée sur son socle au milieu de la table... je me souviens qu'il était tard... et c'est peut-être pour ça que j'ai cru en ce que j'ai vu. J'ai allongé mes deux bras de manière symétrique, et j'ai posé mes mains sur la surface sphérique de la boule... aussitôt une lumière vive émanant du centre de la boule retint mon attention, puis cette lumière m'a enveloppé, et je vis le futur...

Il s'agissait d'une pièce complètement sombre. Dans le noir je ne pus apercevoir qu'une sorte de cercle de lumières rouges, assez espacées, sur le sol, et une faible lumière jaune qui illuminait un casque pendant du plafond. Je me suis deplacé jusqu'au milieu du cerce pour examiner le casque... il n'avait rien de particulier, sauf qu'il pouvait couvrir ma tête comme si le casque était une cloche et qu'il était relié par une infinité de cables luisants à un plafond que je ne pouvais pas apercevoir. J'ai ensuite fixé le casque sur ma tête...

Lumière. Une lumière aveuglante. Puis une infinité de couleurs indescriptibles envahirent ma vision. A fur à mesure, ces couleurs devinrent une sorte de tunnel, ou d'un tourbillon. La sensation de vitesse était impressionante bien que j'étais conscient de rester immobile. Je pouvais sentir mon esprit voyager à une vitesse hallucinante vers une destination qui m'était inconnue.

L'espace... le tunnel de couleurs s'est arreté après quelques secondes de s'être formé, et je me suis retrouvé devant un champ étoilé. Puis j'ai remarqué que des objets farfelus flottaient dans le vide. Une voix agréable de femme se fit entendre, venant de nulle part. "Welcome to the Macrosoftware World Wide Space - Pointez l'icône du programme que vous voulez sélectionner." Ces objets étaient donc des icônes... mais ils avaient l'air si réels... J'ai tenté d'en toucher un, mais j'étais trop loin. Alors j'ai essayé de me déplacer... en vain. Je restais sur place. Alors j'ai intuitivement pointé une icône au hasard avec mon index. Elle se mit à s'approcher de moi. J'ai pu distinguer une voiture qui réposait sur un socle de pierre où l'on pouvait lire l'inscription "Go to Mail Building", gravée. D'autres fonctions étaient disponibles sur différentes parties de la voiture.

Mais je n'ai pas eu le temps d'éssayer. Ma vision tourna d'elle-même, très brusquement, de cent quatre vingts degrés, et je vis une main gigantesque. La main me fit signe de m'approcher, et sans pouvoir rien faire, j'ai commencé à me déplacer dans cette direction. J'étais comme aspiré lentement. J'ai essayé d'attraper quelque chose pour m'y agripper, mais il n'y avait rien à faire. Quand la main me toucha, je perdis connaissance...

La salle ou j'ai ouvert les yeux était aussi très étrange. J'étais assis, et attaché sur une chaise. La salle était ronde, je crois, et luisait d'une étrange couleur cyan venant du sol.
J'entendis une porte s'ouvrir, puis des longs pas... Un vieillard fît son apparition, devant moi. Il avait un air assez familier. Il me regarda, puis me parla. Ses paroles étaient les suivantes:

"Vous savez sans doute qui je suis."  Il marqua une pause, mais je ne dis rien. "Je suis Gil Bates, président de Macrosoftware." Nouvelle pause. "Je sais que vous venez du passé.", puis il prit des grands airs, "je sais tout. Nos techniciens ont trouvé la manière de me donner la vie éternelle, et en même temps de donner une vie aux machines. Le seul prix à payer, est celui de devoir trouver des cerveaux humains pour les utiliser comme centres de stockage. J'ai déjà en ma possesion les six septièmes de la population de cette planète. Vous allez avoir l'honneur d'être un de plus..."
 
Soudain ma vision disparut et je me suis trouvé dans les tenèbres. Quand j'ai recupéré la vue, quelques longues secondes plus tard, je revis la boule de crystal sur la table. J'étais trempé de sueur, comme si je venais de me réveiller d'un mauvais rêve. Je me suis dit que ce que j'avais vu en entendu n'avait pas de sens. Pourtant, ça avait l'air si vrai...

Finalement je ne me suis levé de la chaise que pour ouvrir un placard et en sortir une hache. Je suis revenu dans ma chambre. L'ordinateur était allumé. L'écran montrait un logo, et affichait "Doors 98 (c) Macrosoft".

Trente coups de hache sur l'unité centrale ont suffi à enlever l'hideux message de l'écran. Bates n'aura pas ma peau.